23 novembre 2005

Y'a pas que les balades...

Je vais essayer de vous raconter, clairement, simplement et en expliquant ce que je fais durant mon stage…
Je pense que vous l’avez tous compris je travaille pour Doyle Fraser Sailmaker (fabriquant de voiles) à Somersby à 80km au nord de Sydney, dans la province du New South Wales en Australie.

Commençons par le commencement. Le groupe Fraser est un des leaders dans la fabrication de voiles en Australie (faut bien faire un peu de pub quand même, d’ailleurs j’ai mis leur site net dans mes liens, si vous avez pas encore jeté un coup d’œil). Le groupe Fraser est composé de X lofts qui sont répartis en Australie, mais il y en a aussi un au Japon et un a Dubaï. Tous ces lofts Fraser sont franchisés au groupe mondial Doyle, qui lui est implanté dans plus de 20 pays avec pas moins de 40 lofts de production. C’est pour ça que le groupe s’appelle Doyle Fraser, c’est en fait 2 trucs un peu distincts.
Somersby s’occupe en fait du design et de la fabrication de la plupart des nouvelles voiles pour le groupe Fraser, les autres lofts ne sont que des agents et/ou réparateurs.

Mais entrons dans le vif du sujet. Je pense que de près ou de loin tout le monde a déjà vu une voile ! Vous avez peut être remarqué que c’est en fait un assemblage de plusieurs petits panneaux qui sont cousus (ou collés dans certains cas) entre eux. Ceux qui ont fait un peu plus attention quand ils ont regardé cette voile, ont peut être remarqué qu’une voile n’est pas plate, elle a des creux qui sont placés différemment selon les voiles. C’est grâce a l’assemblage de ces fameux panneaux que l’on obtient le creux. C’est un peu compliqué à expliquer comme ça simplement avec des mots mais en gros :
Toutes les parties hautes des panneaux sont découpées avec une forme arrondie. Quand ce bord va être cousu (parallèlement au bord arrondi) avec son voisin (qui lui est droit), il va le forcer à prendre une forme qui n’est pas naturelle pour lui et donc donner un creux… je suis pas sure d’être très claire…
Bref suivant la forme de ces arrondis (et aussi suivant la disposition et le nombre de panneaux) la voile va avoir telle ou telle forme.

Revenons au design. La première étape est déjà de déterminer les dimensions de la voile (leech, luff, foot soit chute, attaque et pied ou encore avant, arrière et en bas …). Cette étape se fait soit en mesurant directement sur le bateau, soit un regardant sur un ‘rig ou sail plan’, (dessin du gréement). Pour ceux à qui ça dit qqch, on relève en fait les I, J, P, E, LL …etc. etc.
Parallèlement (si ce n’est pas déjà fait), il faut définir ce que le client veut exactement, et surtout le prix qu’il veut y mettre, le ou les matériaux, crosscut, radial…
Une fois que cette étape est terminée, il faut déterminer un moule (en fait c’est pas du tout que la voile va être moulée, pour l’instant ça existe pas encore les voiles moulées), ce qui est appelé moule est la forme idéale de la voile. Une fois ce moule défini, il faut créer la voile elle même. Et comme ce n’est pas possible avec un seul ‘bout de tissus’, intervient ce qui est appelé le ‘panel layout’. Il s’agit d’approcher au mieux la forme du moule, grâce à des bandes de tissus (si vous voulez plus d’infos sur les tissus vous pouvez allez voir sur www.doylesails.com ou sur les sites de fournisseurs, Dimension Polyant, Contender, Bain Bridge international, Challenge ou un truc du genre) sachant que ce n’est pas forcement du vulgaire tissus mais que ce peut être un laminé complexe, et coûteux, voir très coûteux. Je ne vais pas rentrer dans ces détails la maintenant. Si vous voulez je pourrais vous raconter ça un autre jour.
Et approcher le moule parfaitement est impossible. Ou du moins impossible en tenant compte des contraintes économiques ou matérielles… En effet, si les panneaux sont trop petits, cela va nécessiter un nombre important de coutures et donc par la même occasion beaucoup de temps… et comme le temps c’est de l’argent… Il faut aussi voir le fait que si c’est une voile laminée et que les fibres sont coupées trop souvent, il n’y a plus aucun intérêt à la chose. Le but du jeu est donc de trouver une sorte de compromis… ce qui n’est pas toujours chose évidente.
Une fois ces panneaux déterminés il faut également définir la position des lattes (cette étape se fait même avant normalement). Les lattes sont des tiges rigides (qui peuvent en fibres de verre ou de carbone) et qui servent à aider la voile a garder sa forme. Elles peuvent être ‘forcées’, elles partent du mât et vont jusqu’à la chute (arrière de la voile), ou juste partir de la chute et avoir une longueur définie.
Il faut également définir les patchs, ce sont les renforts que l’on trouve aux ‘coins’ de la voile, généralement la ou elle est le plus sollicitée, puisque c’est la ou elle est fixée.
Et puis les ris, quand il y a trop de vent, la surface de la voile est réduite grâce aux ris. Ainsi que les détails genre fenêtres, bandes de visualisation…
La partie design s’arrête à peu près la. Ensuite, vient la partie découpe. La première étape c’est le ‘nesting’. Pour découper les panneaux, à Sommersby ils possèdent un ‘plotter-cutter’ (table traçante et de découpe) de 20m40. Un logiciel (en l’occurrence plotter-pilot ou Tangent) permet de trouver la disposition des panneaux sur la table qui sera la plus efficace (ie, prendra le moins de place possible, donc moins de chutes, donc moins de matière perdue donc argent de gagné (ou du moins de pas perdu)). C’est le nesting. A l’origine cette technique est principalement développée pour les fabricants de vêtements, c’est exactement la même chose. Une fois cette étape terminée il suffit d’envoyer les données à la table traçante qui s’occupe du reste.
L’étape qui suit est celle de l’assemblage, selon la technique que je vous ai exposée au début. Les panneaux sont collés (dans tous les cas mais ce peut être soit parce que c’est une voile collée comme c’est le cas pour la plupart des spi légers soit pour maintenir les panneaux entre eux pour aider lors de la couture. Dans les 2 cas ça ne sera bien sur pas la même colle) . J’ai oublié de dire que la table numérote aussi les panneaux selon les numéros donnés dans le ‘sail design’ ce qui permet de les assembler dans le bon ordre, sinon ce serait vite un bordel monstre !! Pour un spi pour un bateau de 38 pieds (11,57m), soit environ 200m², il y a déjà facilement une 100taine de panneaux !
Ils sont ensuite cousus (si nécessaire). Puis étape de finition, patches…
Elle est ensuite rangée dans son sac et livrée au loft qui l’a commandée.

Bon au final, je ne vous ai pas raconté ce que je faisais, mais c’était pas possible sans vous expliquer déjà comment on fabrique une voile. Ce sera donc pour la prochaine fois… je vous laisse digérer ça un peu d’abord !
Et puis c’est dommage que je doive faire mon rapport de stage en anglais, sinon j’avais déjà presque un paragraphe !!! Shame…

A+ pour+

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonne description, très claire et simplifier. On attend avec impatience de savoir ce que tu fais...
Julien ("réparateur" chez Doyle brisbane)